Principes techniques :
La ligamentoplastie du LCA (ligament croisé antérieur) est une greffe autologue (venant du patient), qui va remplacer le LCA lésé. Cette greffe est prélevée au niveau des tendons ischio-jambier (Demi-tendineux +/- gracilis).
Le nouveau ligament émerge dans l’articulation, en lieu et place de l’ancien, au travers de tunnels intra-osseux dans le fémur et le tibia. Les réglages de tension sont fait puis la greffe est fixée définitivement, avec différents moyens de fixation selon les conditions (vis, agrafes, …
La transformation de la greffe (tendon) en un ligament complétement « efficace » n’est pas immédiate. Dans un premier temps la greffe passe par une phase de fragilité relative, puis secondairement, il va acquérir sa vitalité et sa résistance définitive.
C’est pour cette raison que la rééducation doit s’adapter à ces différentes phases.
Chronologie :
1er et 2éme mois : La fixation du transplant dépend du matériel, sans ancrage naturel osseux.
Une rééducation douce et prudente suffit, avec priorité à la cicatrisation, à la mobilité et au bon verrouillage du quadriceps. La reprise de la marche peut se faire rapidement, avec reprise de l’appui, associé à la prévention des troubles trophiques.
3éme et 4éme mois : L’ancrage du transplant est satisfaisant mais la greffe est encore fragile, elle est en cours de « ligamentisation ».
La rééducation va favoriser la récupération de la mobilité, de la fonction, de la gestuelle et des activités réflexes de protection.
Après le 4éme mois : L’ancrage est acquis, la résistance du transplant devient de plus en plus performante.
La rééducation est dynamique, avec renforcement musculaire en endurance et en puissance. Un travail de la proprioception dynamique est également réalisé. Début de réinsertion physique et sportive progressive, avec possibilité de reprendre l’entrainement sportif après le 6ème mois selon le sport pratiqué.
En conclusion :La rééducation doit s’adapter à la chronologie de la cicatrisation et de la ligamentisation de la greffe. Le protocole standard de rééducation respect cette chronologie, avec comme but, l’obtention d’un genou sec, stable, indolore, mobile, associant un contrôle musculaire et des capacité fonctionnelles adaptées aux activités antérieurement pratiquées.
Protocole standard de rééducation après ligamentoplastie du croisé antérieur.
La prise en charge est établie sur huit mois environ et se découpe en cinq périodes.
Période 1 : cicatrisation : 3 premières semaines (de J0 à J21), de l’intervention jusqu’à l’ablation des points ou des agrafes.
Objectifs : 3 semaines sont nécessaires à l’obtention de la cicatrisation primaire, le genou doit être le plus sec et le moins douloureux possible. Il faut obtenir un verrouillage actif en extension et une flexion de 60° à 90°. La reprise d’appui se fait progressivement. La prévention des maladies thromboemboliques est indispensable.
Moyens :
- membre inférieur en extension protégée par une attelle simple.
- Déambulation possible avec reprise d’appui progressif, sous couvert de cannes canadiennes.
- travail musculaire quatre faces en extension en position couchée.
- mobilisation douce manuelle et sur arthromoteur : 0° à 70°
– massage et réveil musculaire, glaçage et physiothérapie.
– électro stimulation pour prévenir l’amyotrophie.
– proprioception en chaîne ouverte.
– ablation des points chirurgicaux ou des agrafes au plus tard au 21e jour.
– suivi du traitement par HBPM et thérapeutiques antalgiques.
Incidents possibles :
- hydarthrose, hématome.
- problèmes veineux.
- retard de cicatrisation.
- genou hyper algique.
Contre-indications :
- tout travail actif en chaîne ouverte contre résistance du quadriceps et des ischio-jambiers est interdit.
- Recurvatum interdit.
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Période 2 : autonomie : De J21 à J45 : mobilité et réveil musculaire.
Objectifs : de la troisième à la sixième semaine, c’est la phase de reprise de la marche en appui complet et de la récupération des amplitudes articulaires. L’attelle devra être progressivement libérée et enlevée et les cannes abandonnées de telle façon qu’a 45 jours post opératoire le genou ne soit plus protégé, qu’il soit sec, indolore, non inflammatoire, et que le volant articulaire approche les 120° en flexion et 0° en extension.
En fin de deuxième mois la mobilité doit être totale et indolore et il doit y avoir un bon contrôle musculaire réflexe dans les actes de la vie quotidienne.
Si la mobilité ne progresse pas régulièrement, l’avis du chirurgien doit être demandé.
Moyens :
- Rééducation de la marche.
- Récupération de la mobilité par techniques manuelles et instrumentales.
- Activités musculaires modérées et progressives en co-contractions.
- Verrouillage poplité isométrique.
- Renforcement musculaire par électrostimulation.
- Activités d’équilibre et de proprioception statique bipodale puis unipodale.
- Presso-thérapie en fonction des besoins, Balnéothérapie, Massage et soins péris cicatriciels.
- En fin de période, vélo sans résistance si amplitudes satisfaisantes, marche sur tapis roulant.
Incidents possibles :
- genou chaud et hydarthrose (l’avis du chirurgien doit être demandé).
- Raideur : si arrêt de la progression : demander avis chirurgical pour mobilisation.
- Déficit musculaire : peut s’expliquer par l’ancienneté de la pathologie ou par une chondropathie associée.
Contre-indications :
- pas de travail du quadriceps contre résistance en chaîne ouverte
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Période trois : consolidation : jusqu’au quatrième mois.
Objectif : récupération de la confiance du patient en son genou.
Le travail musculaire du quadriceps et des ischio-jambiers en co-contraction peut-être accentué et raisonnablement intensifié en tenant compte des phénomènes de ligamentisation.
Les activités proprioceptives deviennent prioritaires ainsi que la rééducation gestuelle et les activités d’endurance. (Marche, vélo, Steps, natation en crawl et dos crawlé).
En fin de période la proprioception devient dynamique en bipodale puis unipodale avec matériel facilitant.
Moyens :
- travail en co-contraction dans différente angulation du genou. Type presse.
- Travail des ischio-jambiers en développant la puissance et la vitesse de contraction.
- Travail du quadriceps en chaine cinétique fermée et en isométrique en extension.
- Développement du contrôle neuro-musculaire et de la proprioception. Plateau instable, balancelle, trampoline.
- réentrainement cardio-vasculaire à l’effort (vélo, Steps)
- Début de footing en terrain plat et souple en fin de période.
Incident possible
- sensibilité rotulienne.
- Genou inflammatoire.
- Tendinite de l’appareil extenseur (si KJ)
Contre-indication
- Activités dynamiques en puissance maximale
Période 4 : réathlétisation : jusqu’au sixième mois.
Objectif : à partir du quatrième et cinquième mois le tendon retrouve sa résistance, des activités plus importantes peuvent être entreprises, à la fois en puissance et en endurance. Le footing est rajouté au programme de reprise d’activité dont la base reste la natation et le vélo. Rééducation musculaire et travail en endurance, puissance et activités proprioceptives dynamiques.
Moyens :
- athlétisation des différents groupes musculaires, presse et banc de musculation.
- travail isocinétique
- Travail dynamique avec sauts et changements de direction en place.
- Poursuite du footing avec accélérations, natation type crawl avec palmes, vélo.
- Activités de réinsertion physique progressive.
Incident possible :
- sensibilité rotulienne, genou inflammatoire, tendinite si KJ.
Contre-indications :
- activités physiques et sportives avec pivot et contact.
Période 5 : reprise du sport : au-delà du sixième mois.
Objectif : au-delà du sixième mois la reprise des activités gestuelles peut s’envisager, c’est la rééducation pré sportive. Celle-ci peut durer plusieurs semaines à plusieurs mois suivant le sport pratiqué. La reprise de l’entraînement sportif est envisageable vers le septième ou huitième mois et la reprise de la compétition entre neufs et 12 mois selon le type de sport. Au septième mois il est conseillé de faire un bilan isocinétique comparatif du genou afin de définir les capacités fonctionnelles musculaires, pour orienter la préparation sportive.
Moyens :
- tests isocinétiques comparatifs de niveaux et d’orientation.
- Travail musculaire intense.
- réapprentissage des gestes sportifs préférentiels.
- En fonction des tests, du sport et du niveau pratiqué, reprise de l’entraînement spécifique.
- Bilan sportif spécifique.
Incident possible :
- pathologie tendino-musculaire de la pratique sportive.
Contre-indications : l’anticipation de la reprise de la compétition.
Conclusion
Les techniques de réparation du ligament croisé antérieur sont devenues année après année d’une grande fiabilité. Les suites se sont simplifiées et la connaissance de l’évolution histologique du transplant a permis de définir la tolérance mécanique optimale et d’adapter la rééducation en fonction des délais de transformation et d’ancrage du niveau ligament.
La synthèse des différents protocoles de prise en charge a permis d’établir un protocole consensuel de rééducation. Celui-ci est indicatif, il définit les grandes lignes du traitement, il doit s’adapter à chaque cas en fonction des bilans d’évolution et des recommandations du chirurgien.
Fiche à télécharger : Fiche conseils patients DIDT